Descriptions de Tronjheim et de Farthen Dûr

Alignées le long des murs, des rangées d'épais piliers de marbres sertis de rubis et d'améthystes. D'innombrables lanternes suspendues entre les piliers déversaient une lumière liquide. Des entrelacs de fils d'or brillaient à la base des piliers comme de la dentelle en fusion. Au plafond étaient scultées des têtes de corbeaux, figurées bec ouvert, comme en plein cri. Au fond du vestibule se dressait une colossale porte noire ; sur chaque battant, des lignes argentées scintillaient, représentant une couronne à sept pointes.
Telle était l'entrée si l'on entrait du côté de la porte de la Dent-d'Ours.

Les battants pivotaient sur des gonds invisibles, laissant les rayons du soleil entrer à flots.

Ce qui se présentait aux yeux de tous était un gigentesque cratère volcanique. Ses parois montaient en rétrecissant jusqu'à une petite ouverture, située si haut que l'on ne pouvait estimer la distance qui la séparait du sol. Un rai de lumière passait par l'orifice, illuminait le centre du cratère en laissant le reste de la caverne dans une semi-obscurité.
La paroi opposée du cratère, enveloppée d'un hâlo bleuté, était éloignées de quelques dix lieux. Des stalactites géantes, épaisses de plusieurs centaines de pieds et longues de plusieurs de plusieurs milliers, étaient suspendues à une hauteur vertigineuse au dessus du sol, pareilles à des dagues scintillantes. Plus bas, sur les parois du cratère, de sombres épaisseurs de mousse et de lichen recouvraient la roche.
En baissant les yeux, on découvrait un large sentier pavé, partant du seuil que l'on venait de franchir. Le chemin courait droit vers le centre du cratère. Il se terminait au pied d'une montagne, d'une blancheur éblouissante, brillant comme un diamant brut, et envoyant de tous côtés des éclats de lumière colorée. Son sommet n'arrivait pas à un dixième de la hauteur du cratère qui la surplombait et l'entourait, mais cette petitesse était trompeuse : elle s'élevait à plus d'une lieu.

Ce cratère, c'est le Farthen Dûr. Korgan, le père des nains, l'a découvert voilà des millénaires, tandis qu'il creusait à la recherche de l'or. Au centre se dresse, non pas une simple montagne, mais Tronjheim, la ville-montagne, entièrement construite dans le marbre le plus pur.
Farthen Dûr était le refuge idéal. Les parois étaient trop élevées pour qu'un dragon les survolât. Aucune armée ne parviendrait à forcer l'entrée, même si elle parvenait à distinguer la porte cachée.

Le marbre de Tronjheim était parfaitement poli et ses contours aussi fluides que s'ils avaient été moulés sur place. Ces murs étaient pourvus d'innombrables petites ouvertures rondes, bordées d'élégantes frises scultées. Une lanterne de couleur était suspendue devant chaque fenêtre, projetant un éclat de lumière sur la pierre environnante. Nulle tourelle, nulle cheminée n'était visible. Deux griffons dorés, de trente pieds de haut, gardaient une porte massive en bois, encastrée dans les contreforts de Tronjheim. Au dessus, d'épaisses poutrelles soutenaient une très haute voûte.
Les murs étaient ponctués par des piliers élancés en jaspe rouge sang. Entre les piliers se dressaient d'imposantes statues représentant des créatures fantastiques, capturées à jamais par le burin du sculteur. La lourde porte s'ouvrait dans un grondement. Des chaînes cachées relevèrent les poutrelles gigantesques dévoilant un passage qui, sur quatre niveaux, conduisaient au coeur de Tronjheim. Les trois premiers étages étaient percés de rangées d'arches révèlant des tunnels gris qui s'incurvaient dans le lointain. Au niveau du sol, les arches étaient fermées par de solides battants. Entre les étages étaient tendues de riche tapisseries, brodées de silhouettes de héros ou de tumultueuses scènes de bataille.

Le très long hall d'entrée finissait par une arche flanquées de deux colonnes d'onyx noires. Des zircons (varieté de pierre) jaunes mesurant trois fois la taille d'un homme habillaient les colonnes noires, projetant des reflets dorés jusqu'au bout du hall.
Les voyageurs arrivaient ainsi dans une salle circulaire, d'environ mille pieds de large, et s'élevant jusqu'au sommet de Tronjheim, ses parois se rétrecissant à mesure qu'elles montaient. Des arcs perçaient les murs. Il y en avait une rangée à chaque niveau de la ville-montagne. Le sol était taillé dans de la cornaline (pierre translucide, teintée de rouge orangé) polies ; Dessus était réprésenté un marteau entouré de douze pentacles d'argent.
Quatre halls, dont celui que les voyageurs venaient de traverser, convergeaient vers cette salle, divisant Tronjheim en quatre quartiers. Trois d'entre eux étaient identiques ; seul celui qui s'ouvrait à l'opposé se distinguait des autres. A droite et à gauche, de hautes arches donnaient sur des escaliers qui descendaient en vis-à-vis avant de s'enfoncer sous terre.
Le plafond était surmonté d'un étoile en saphir jaune d'une taille monstrueuse. La pierre était aussi large qu'épaisse. On l'avait taillée en forme de rose épanouie. L'artisan avait executé cette oeuvre avec un tel talent que la fleurs paraissait presque réelle. Une large guirlande de lanternes bordait le saphir qui projetait des striures de lumière dorée tout autour. Les rayons étincellants du joyau étoillé lui donnait l'apparence d'un oeil de géant fixé sur les visiteurs.
Telle était Isidar Mithrim l'étincellante, la fierté de Tronjheim.

Tronjheim était un témoignage sidérant de la puissance des nains et de leur persévérance.